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Forte angoisse de séparation lorsque je suis en déplacement professionnel, que faire ?

il y a 9 mois

Bonjour,

Je vous écris car ma fille de 22 mois manifeste une très forte angoisse de séparation depuis mon dernier déplacement professionnel (4 jours), qui remonte à 3 semaines maintenant.

Depuis sa naissance, notre fille a pu bénéficier d’une grande présence de ma part et de son papa (nous travaillons tous deux de la maison). Elle est gardée à temps plein depuis ses 7 mois en garderie – l’intégration s’est passée facilement et elle s’est bien attachée à ses éducatrices. Je l’ai allaitée jusqu’à ses 14 mois, et le sevrage s’est également opéré en douceur.

Mon emploi m’oblige à réaliser quelques missions à l’étranger tous les ans. J’ai réussi à limiter ces déplacements au maximum depuis sa naissance, mais j’ai tout de même fait 5 voyages jusqu’à présent, avec des absences d’une semaine généralement. Le premier a eu lieu avant le sevrage (à ses 9 mois) et les suivants à 14, 19 et 21 mois respectivement. A chaque fois, elle a été gardée par son papa (pas de modification de la routine habituelle) et cela s’est passé sans accroc.

Toutefois, mes deux derniers déplacements ont été plus rapprochés que d’habitude, et elle a fortement réagi lors du dernier. Son papa m’a dit qu’elle me réclamait beaucoup, les éducatrices ont confié qu’elle avait été très morose, un peu « déprimée » pendant toute la durée de mon absence.

Depuis mon retour, elle refuse que son papa la couche, lui donne le bain (elle hurle), alors que c’était une tâche que nous partagions jusqu’à présent. Elle conserve toujours une complicité avec lui – qui se manifeste autrement (plutôt sur l’apprentissage du langage, elle le sollicite pour partager ses progrès) – mais refuse les soins et jeux avec lui. Je ne peux plus sortir de la maison, même 5 minutes sans qu’elle ne soit en larmes.

C’est difficile pour son papa, mais je me demande surtout sur comment aborder les déplacements à venir cette année.

Avez-vous des conseils pour l’apaiser ? Pour aider à préparer de prochaines absences et l’aider à surmonter la situation ? J’essaye de lui expliquer et je pense qu’elle en comprend beaucoup mais j’imagine qu’une semaine d’absence doit être interminable (et difficile à se représenter) à cet âge. Il est difficile pour une maman de la laisser dans ce niveau de détresse.

Merci beaucoup d’avance pour vos précieux conseils !

La réponse de notre expert

SALINIER Catherine, Dr, Pédiatre Pédiatre Ambulatoire & Past Présidente de l'AFPA
 Dr Catherine SALINIER

Bonjour Madame,

Je comprends votre trouble et votre inquiétude. On voudrait que tout soit toujours facile et merveilleux… Cependant il faut vous rassurer en ce sens que de nombreux enfants vivent cette situation, à commencer par les enfants de personnel naviguant. Actuellement, beaucoup de professionnel·le·s par exemple aussi les enseignants travaillent loin de leur domicile du fait du travail de leur partenaire.

Bon cela étant posé ça ne vous dit pas ce qu’il faut faire…

Tout d’abord, votre enfant grandit et ressent de façon plus consciente qu’avant ces situations émotionnellement difficiles pour elle. En le ressentant plus consciemment, elle les exprime plus concrètement. 2 ans est l’âge de l’opposition et des « non » et des colères, de l’affirmation de la personnalité, vous le savez bien. Si le/les parents sont affectés par cette expression un peu violente des affects de l’enfant, il est alors encore plus déstabilisé et « en rajoute » (c’est inconscient bien sûr).

Il importe donc que vous soyez sereins et calmes. Votre vie est votre vie. Vous ne pouvez pas en changer et ce n’est quand même pas toutes les semaines que vous partez. Donc il faut prendre du recul face à ces démonstrations de tristesse, ou d’opposition vis-à-vis de son papa, voire se montrer un peu ferme.

Plus vous serez calmes et plus vous lui direz que c’est votre vie, qu’elle est comme cela (au lieu de lui dire 10 000 fois que ce métier vous embête aussi, ce qui j’espère est faux, et de lui dire 10 000 fois que vous l’aimez, ce qu’elle sait de toutes les façons), et plus elle sera rassurée et s’adaptera à la situation.

Evidemment, je suppose que vous lui parlez en visio chaque jour quand vous êtes absente. C’est très important. Vous pourriez le faire (si c’est possible : le matin quand elle se lève, au sortir de la crèche et le soir au coucher). Si elle refuse de vous parler car elle est en train de jouer, ne l’obligez pas, et si cela la fait pleurer, ce n’est pas très grave et écourtez alors l’appel pour que ça ne se transforme pas en drame. Ce qui est important, c’est un lien, même court (et même difficile)…

De plus, franchement, de mon expérience c’est une phase à passer… comme une vague que vous allez surfer avec elle.